Une ile qui veut conserver sa paix au large de Tripoli

Publié le 11 mars 2016

Ile aux palmiers ou île aux lapins. Pourquoi une petite île au large de Tripoli a retenu l’attention de l’UNESCO ? Une enquête des globe-reporters du collège Camille Claudel de Paris et de l’école élémentaire de la Porte d’Ivry.

Carnet de route

L’envoyé spécial des globe-reporters a contacté à Tripoli Mme Safa El Ghor qui est professeure de civilisations de l’université libanaise. Safa a mené sa propre enquête. Elle a plongé dans ses souvenirs, fait des recherches sur Internet, interrogé des habitants de la ville d’El Mina, des pionniers de l’île pour répondre aux questions.

Depuis quand la réserve naturelle existe-t-elle ? Que lui a apporté son classement par l’UNESCO ?

Bien que cette île existe depuis des siècles, on a déterminé sa découverte en 1224 d’après les vestiges remontant à l’époque des croisades et le peu de ruines d’une petite église datant de la période des mamlouks que le prince d’Antioche (Antakya en grec la Turquie aujourd’hui) Bohémond a ordonné de construire afin de marier son fils avec la veuve du prince de Chypre.

Le 9 mars 1992, un décret ministériel classe l’île comme réserve naturelle maritime et depuis elle bénéficie de la protection de l’UNESCO.

Son classement par l’UNESCO lui a permis d’être connue sur le plan international. Localement, des projets sont mis en place pour aménager l’île aux lapins. Certains ont abouti :

- nettoyage de la réserve des bombes lancées par les Israéliens pendant la guerre,

- plate-forme permettant aux bateaux qui transportent les voyageurs d’accoster,

- aménagements à l’intention des visiteurs,

- parasols naturels confectionnés à l’aide de feuilles de palmiers ou de roseaux poussant dans la réserve. 

Combien de personnes travaillent à l’année dans la réserve ?

D’après les pêcheurs, trois gardiens les « Rangers » surveillent sur l’île tout au long de l’année pour empêcher les pêcheurs de s’y approcher et de franchir la ceinture d’eau qui entoure l’île. Pendant les jours ouvrables, tout le monde apporte sa nourriture. Les gardiens veillent au respect des règles imposées par la loi ; chasse, propreté, objets emportés, conflits et bagarres, etc...

Une contribution de 10 000 livres (6 euros) peut être demandée par le gardien pour l’utilisation d’une table, d’un banc et d’un parasol en feuille de palmiers. 

Combien de visiteurs s’y rendent chaque année ? Quelle est la meilleure période de l’année pour venir ? Pourquoi ?

Il y a 3 mois d’ouverture par an ; juillet, août et septembre. C’est la meilleure période pour venir étant donné que les autres mois, l’accès à l’île est interdit.

Le nombre de visiteurs et de baigneurs ne dépasse pas les vingt mille par an.

Les chercheurs et les scientifiques ont le droit d’aller sur l’île à n’importe quelle période de l’année à condition d’avoir une autorisation préalable du ministère de l’Environnement et de l’armée chargée de protéger les réserves naturelles.

Les visiteurs peuvent-ils trouver un hébergement sur place ? Comment l’hébergement, les déplacements, les visites sont-ils organisés ?

Il n’y a pas d’hébergement sur place. Les constructions sur l’ile sont interdites.

L’hébergement se fait dans les hôtels aux alentours de la ville. Il y en a deux très modestes tout près du rivage et un autre de 4 étoiles, je pense, à 2 km des deux autres, tous dans le quartier d’El Mina. À Tripoli, à trois km du rivage, on peut trouver d’autres hôtels aussi.

Pour les déplacements de l’hôtel à la rive, il est possible de se mettre d’accord avec des chauffeurs de minibus. De la rive jusqu’à l’île, des bateaux de 30 à 50 passagers se trouvent régulièrement en attente pour transporter les gens. Il faut compter 10 dollars pour un aller – retour.

Il est important de vous informer que ces bateaux ne sont pas équipés de gilets de sauvetage, et je ne pense pas qu’ils ont une assurance (besoin de renseignement).

Il n’y a pas de visite organisée surtout pour les élèves qui viennent de l’étranger, mais je pense que si vous décidez de venir, il faudra contacter la municipalité d’El Mina ou l’un des gardiens de l’ile. On peut contacter M. Issam Sidawi qui est arabophone ou M. Amer Haddad, ingénieur à la municipalité de la ville qui comprend et parle un peu le français.

Quelles sont les espèces (faune, flore) les plus rares répertoriées sur le site ?

Faune : 156 espèces d’oiseaux visitent l’île. Les sédentaires nommés par les pêcheurs et les gardiens sont : le héron, la bergeronnette grise, le goéland, le gravelot, le chevalier combattant, l’aigrette gazette, la mouette, la sarcelle d’hiver et beaucoup d’autres encore comme la chauve-souris. Les amphibiens sont de plus en plus rares et risquent de disparaître. La tortue verte et la tortue grosse tête qui contribuent à l’équilibre écologique en nettoyant la côte des méduses sont aussi en danger. Malheureusement en prenant les sacs en plastique pour des méduses elle s’étrangle et meurt. On peut trouver aussi des oursins, des homards des écrevisses des papillons jaune et blanc et des éponges.

Flore : le fenouil riche en iode, la jonquille, la narcisse marine et le glauciumcorniculatum connu dans le soin des yeux.

Y a-t-il un ou plusieurs programmes de préservation des espèces en cours pour lesquels la direction est particulièrement impliquée ?

Les projets en cours :

- un centre pour les chercheurs et les observateurs.

- un projet de repeuplement, de reboisement, et de réintroduction d’espèces disparus.

D’une façon générale, les variétés animales et végétales n’ont pas encore fait l’objet d’une étude exhaustive et approfondie. Apparemment ce sont des projets qui ont été réfléchis, annoncés et diffusés dans les médias, mais sur le terrain, pour le moment rien ne se voit.

Quels sont les problèmes que vous voyez pour l’avenir de la réserve ?

À mon avis, l’île ne doit pas subir de rénovations qui déforment son relief et son panorama. Les constructions l’exposent au danger de l’agression humaine comme la chasse et le camping. Elle est parmi les rares plages qui demeurent publiques et gratuites et où les habitants de cette ville, qui sont en majorité pauvres, peuvent s’y rendre pour souffler et se détendre un peu loin des soucis de leur vie difficile.

Un autre danger, celui de la pollution du littoral, car la décharge publique se trouve sur la côte à 7 km de l’île. 

Les partenaires de la campagne

  • Région PACA
  • Institut français du Liban
  • Fondation SNCF