« Un instrument de musique, c’est de l’amour » Burkina Azza

Publié le 26 janvier 2017

C’est à la demande des globe-reporters du collège Lakanal de Vitry-sur-Seine qui ont repéré son existence que l’envoyée spéciale a pris contact avec le groupe de musique Burkina Azza. Adama KOUETA, Seku COULIBALY, Ousmane KOUETA, Koueta SOLO et Bezou KOUETA l’accueillent avec une grande gentillesse et nous racontent leur histoire. Nous découvrons des musiciens engagés et au service de l’éducation.

Culture et francophonie

Burkina Azza donne rendez-vous à l’envoyée spéciale des globe-reporters au milieu de l’après-midi, alors que le groupe est en pleine répétition. Le lieu de rencontre est situé dans le quartier de Tampui, à la sortie nord de la capitale burkinabée.

Il faut 1 bonne heure de moto pour y arriver depuis le quartier général Globe Reporters, dans le quartier de Wemtenga. Quand l’envoyée spéciale et son moto taxi arrivent au grand rond-point de Tampui, le soleil est intense. Adama KOUETA les attend sur sa moto. Il suffit alors de le suivre pour aller à la maison de Bezou KOUETA, un des membres du groupe. 

Burkina Azza est le nom d’un groupe de musiciens burkinabés qui utilisent des instruments traditionnels et perpétue la tradition orale. Leurs chansons sont joyeuses. Les Burkina Azza qui sont illettrés y chantent notamment l’importance d’aller à l’école pour y apprendre à lire et écrire.

« La musique est notre moyen d’expression, mais on aurait aimé pouvoir aller à l’école et être autonomes quand nous voyageons en Europe et qu’il faut remplir tous ces formulaires pour obtenir les visas », affirme Adama, un des cinq membres du groupe.

Dans un coin de la cour de maison de Bezou, un petit cabanon lui sert de lieu d’hébergement. C’est aussi là que les instruments sont entreposés par ces musiciens en quête d’un espace fermé pour faire leurs répétitions sans déranger le voisinage. « Les studios pour des musiciens coutent très cher. Il faut compter 300 euros par mois. Nous ne pouvons pas nous permettre une telle dépense », explique Adama.

L’accueil des 5 musiciens est très chaleureux. Ils sont ravis de jouer pour des jeunes Français, car ils sont très sensibles aux questions d’éducation, et notamment de l’alphabétisation. Dans leurs chansons, ils encouragent tous les enfants à ailler à l’école, un privilège que les Burkina Azza n’ont pas eu. « Comme le dit une de nos chansons, raconte Ousman, si nous savions lire et écrire nous pourrions être plus indépendants lorsque nous voyageons pour nos concerts. Nous pourrions mieux parler français et nous sentir plus à l’aise et plus libres face aux journaux ou aux formulaires qu’il faut remplir/, Mais nous n’avons pas eu cette chance. Nous chantons donc pour que tout le monde puisse aller à l’école. »

Si les Burkina Azza ne savent ni lire et ni écrire, ils sont par contre des rois de la musique. Ils jouent du balafon, font crier leurs tambours, grattent les guitares et savent faire chanter de nombreux instruments. Leur musique est joyeuse et leurs paroles sont sages. Leurs textes sont engagés : ils évoquent l’importance de vivre en paix, des droits humains, du partage, de l’école, d’accepter les autres avec leurs différences et, bien sûr, de la musique. « La musique avec le balafon… c’est de l’amour », conclut Adama.

Voici leurs réponses aux questions des globe-reporters.

Adama KOUETA, leader de Burkina Azza

Pouvez-vous vous présenter ?

Je m’appelle Adama et je suis le leader de Burkina Azza. Le nom du groupe signifie « Les griots de Burkina ». Avant, les griots étaient les musiciens des villages qui transmettaient les nouvelles, les annonces des autorités et qui transmettaient l’histoire du village en chantant. Par exemple, si le chef du village voulait annoncer une cérémonie aux habitants, il appelait les griots qui sortaient les tam-tams, les balafons et autres instruments pour propager la nouvelle dans tout le village et aux alentours. Il en était de même pour annoncer une campagne de vaccination des enfants ou une réunion urgente pour résoudre un problème. Dans le temps, quand la radio n’existait pas les griots jouaient un rôle important. Aujourd’hui le rôle des griots a évolué. Ce sont des gens qui perpétuent cette tradition musicale avec des chansons à message. Nous, les Burkina Azza, nous chantons à destination des enfants et des jeunes.

Depuis combien de temps faites-vous de la musique ?

Nous faisons de la musique depuis que nous sommes enfants. Personnellement, je joue depuis que j’ai 7 ans. J’ai commencé aux côtés de mon papa qui était un grand joueur de balafon dans mon village qui s’appelle Nairena. Il était musicien comme mon grand-père et mon arrière grand-père. J’ai au moins quatre générations de musiciens derrière moi. Mon père m’a appris le respect des instruments, comment les caresser pour qu’ils parlent et qu’ils me permettent de vivre de la musique. Il me disait toujours : « Adama, si tu respectes les instruments, il te feront vivre, ils parleront pour toi ». Et c’est ce que je fais. Je parle avec eux et pour partager sa musique avec tout le monde. Malheureusement il ne m’a pas envoyé à l’école et c’est pour cela que j’ai du mal à m’exprimer en français. `

Faites-vous beaucoup de concert ?

Oui, nous faisons beaucoup de concert, un peu partout dans le pays. Nous jouons dans les festivals comme celui de Djibo, dans des salles de concert comme à l’Institut français de Ouagadougou, dans des bars aussi. On n’arrête pas. Parfois, on fait des concerts hors du Burkina, dans des pays africains et européens comme la France ou la Belgique. En France, nous travaillons avec des écoles. On fait des concerts et nous enseignons aux élèves à jouer des instruments. Nous jouons aussi bien dans de cafés et des petites salles, mais sur des grandes scènes. Nous sommes très sollicités depuis la sortie de notre disque Nairene. En 2016 nous avons fait 46 concerts en France et en Belgique. Mais ce qui nous procure le plus de satisfaction, c’est de travailler avec des jeunes. En France ils sont vraiment très sympas.

Selon vous, quel est le rôle d’un instrument de musique ?

Un instrument de musique joue une mélodie. Une mélodie qui entre dans ton cerveau et ton corps, mais surtout dans ton corps et qui te relaxe parce que la mélodie, c’est de la joie. Je pense au balafon, à sa douce mélodie qui te fait sourire, rigoler, respirer, danser. C’est de l’amour. Moi, quand je joue, je suis amoureux. Amoureux du balafon, du djembé, du doum-doum ou de la kora. Un instrument c’est de l’amour.

Quels morceaux de musique préférez-vous jouez et pourquoi ?

J’aime beaucoup un morceau que nous jouons tout le temps en concerts et auprès des jeunes dans les établissements scolaires. Il parle de l’importance d’être courageux ou courageuse pour aller chaque matin à l’école. Nous, si avions pu faire des études, nous pourrions beaucoup mieux nous exprimer et dire bien plus de choses à tous les globe-reporters. C’est pour cela que nous chantons le courage de se lever chaque matin, pour aller étudier. C’est vraiment très important. 

Quelle est la musique traditionnelle la plus connue au Burkina Faso ?

Nous appartenons à l’ethnie bobo et la musique chez nous se fait en langue bwamu. Notre musique la plus connue est le pawi-bobo. Chaque ethnie du Burkina possède sa propre tradition musicale, mais toutes les musiques traditionnelles utilisent le balafon. Nous, les Burkina Azza, on joue des morceaux des différentes ethnies burkinabées.
 

Sekou KOULIBALY, chanteur de Burkina Azza

Comment vous vient l’inspiration des paroles de vos chansons ?

Je suis griot et je viens d’une famille de griots depuis des générations. J’ai grandi entouré de musique, au milieu des histoires et des chansons de ma famille qui ont nourri mon imagination. Chez moi, tout le monde chante et raconte. C’est comme respirer. Nous avons un style familial pour raconter en chantant. Quand je chante, j’utilise la manière familiale de raconter, mais aussi mes idées, mes histoires à moi, mon imaginaire. Je ne sais pas écrire alors tout est dans ma tête. C’est comme cela que je crée, que je compose, que j’improvise et que je chante pour les autres.

Pourquoi chanter des musiques traditionnelles à travers des récits épiques ?

Quand nous parlons de traditions, nous parlons de notre histoire, de l’histoire de nos villages qui s’est transmise à travers les siècles grâce aux familles de griots et de musiciens. C’est important de préserver notre musique traditionnelle pour la transmettre aux nouvelles générations. Il faut que les enfants sachent ce qui s’est passé autrefois dans leur village et dans notre pays. La musique traditionnelle est à la fois une manière de leur transmettre l’amour pour cette musique et ses instruments, de leur faire découvrir la musique de manière plus générale et de leur apprendre l’histoire orale d’une façon très ludique.

Solo KOUETA, joueur de balafon de Burkina Azza et constructeur des instruments du groupe

Est-ce que vos instruments sont fabriqués à la main ? Combien de temps faut-il pour en faire un ?

Tous les instruments à Burkina Azza sont fabriqués à la main et il faut du temps pour les construire. Surtout pour le balafon. Tu peux mettre trois mois pour fabriquer un balafon. Une fois fabriqué, il faut l’accorder et l’essayer. Puis l’accorder à nouveau, etc. Il faut les mettre au four. Bref, tout cela prend beaucoup de temps. Fabriquer de bons instruments n’est pas facile, mais nous faisons tout nous-mêmes. Comme cela, ils sonnent comme nous le souhaitons et comme nous aimons les entendre.

Sources photographiques

Cette petite maison au quartier de Tampui héberge les instruments de Burkina Azza
Cette petite maison au quartier de Tampui héberge les instruments de Burkina Azza
Dans la cour de la maisonnette qui appartient à la famille KOUETA, les Burkina Azza attendent l’envoyée spéciale des globe-reporters pour un après-midi de répétition.
Dans la cour de la maisonnette qui appartient à la famille KOUETA, les Burkina Azza attendent l’envoyée spéciale des globe-reporters pour un après-midi de répétition.
On bavarde avant de commencer les interviews.
On bavarde avant de commencer les interviews.
Le groupe sort ses instruments : les balafons, doum-doum, kora.
Le groupe sort ses instruments : les balafons, doum-doum, kora.
Voici les tripes d’un balafon ; des calebasses de différentes grosseurs.
Voici les tripes d’un balafon ; des calebasses de différentes grosseurs.
L’envoyée spéciale des globe-reporters interview Adama, le leader du groupe.
L’envoyée spéciale des globe-reporters interview Adama, le leader du groupe.
Sekou COULIBALY,le chanteur du groupe, répond aux questions des globe-reporters.
Sekou COULIBALY,le chanteur du groupe, répond aux questions des globe-reporters.
Ousmane KOUETA, percussionniste de Burkina Azza.
Ousmane KOUETA, percussionniste de Burkina Azza.
Bezou KOUETA.
Bezou KOUETA.
Les 5 musiciens de Burkina Azza plaisantent en posant devant l’objectif des globe-reporters
Les 5 musiciens de Burkina Azza plaisantent en posant devant l’objectif des globe-reporters
Burkina Azza au complet.
Burkina Azza au complet.
Ousmane Koueta, percussionniste.
Ousmane Koueta, percussionniste.
Bezou KOUETA.
Bezou KOUETA.
Burkina Azza se prépare pour la répétition.
Burkina Azza se prépare pour la répétition.
La répétition peut commencer.
La répétition peut commencer.
Cette petite maison au quartier de Tampui héberge les instruments de Burkina Azza
Dans la cour de la maisonnette qui appartient à la famille KOUETA, les Burkina Azza attendent l’envoyée spéciale des globe-reporters pour un après-midi de répétition.
On bavarde avant de commencer les interviews.
Le groupe sort ses instruments : les balafons, doum-doum, kora.
Voici les tripes d’un balafon ; des calebasses de différentes grosseurs.
L’envoyée spéciale des globe-reporters interview Adama, le leader du groupe.
Sekou COULIBALY,le chanteur du groupe, répond aux questions des globe-reporters.
Ousmane KOUETA, percussionniste de Burkina Azza.
Bezou KOUETA.
Les 5 musiciens de Burkina Azza plaisantent en posant devant l’objectif des globe-reporters
Burkina Azza au complet.
Ousmane Koueta, percussionniste.
Bezou KOUETA.
Burkina Azza se prépare pour la répétition.
La répétition peut commencer.

Sources sonores

  • Solo KOUETA : présentez-vous et dites-nous si vos instruments sont fabriqués à la main et combien de temps est-il nécessaire pour en fabriquer un ?

  • Adama KOUETA : On aime travailler avec les jeunes.

  • ADAMA KOUETA : Selon vous, quel est le rôle des internements de musique ?

Sources vidéo

Burkina Azza en répétition