À La Nouvelle-Orléans, les cicatrices visibles et invisibles de l’ouragan Katrina
Publié le 26 mars 2024
Notre envoyée spéciale en Louisiane, Marine LEDUC, tend le micro à Alex KOLKER, enseignant-chercheur au laboratoire océanographique de LUMCON (Louisiana University Marine Consortium) et spécialiste des régions côtières. Ils répond aux questions des élèves de 3è prépa-métiers au lycée professionnel Pierre DE COUBERTIN à Calais, qui ont préparé un reportage sur les conséquences de l’ouragan Katrina à La Nouvelle-Orléans et sur la préparation de la ville face à une nouvelle catastrophe.
Economie, histoire et politique
Les globe-reporters et globe-reportrices du lycée professionnel Pierre DE COUBERTIN envoient leur envoyée spéciale, Marine LEDUC, faire un reportage sur La Nouvelle-Orléans après l’ouragan Katrina, qui a dévasté la ville le 29 août 2005. Plusieurs quartiers ont été sous plusieurs mètres d’eau et les conséquences sont encore visibles en 2024. C’est un sujet qui les intéresse particulièrement, car le Pas-de-Calais a été touché par plusieurs inondations majeures en début d’année.
L’ouragan Katrina marque encore les esprits à La Nouvelle-Orléans. Il a bouleversé des vies. C’est le cas du Krewe de Jeanne d’Arc, qui fait l’objet d’une autre interview par les élèves de Calais : il a été créé en 2008 comme symbole de résilience après Katrina. Une des membres avait d’ailleurs trouvé refuge près de la statue de Jeanne d’Arc et y dormait la nuit après le passage de l’ouragan. Pour une autre personne interviewée, la Chef Adrienne FLAMENT RESH de l’École Bilingue de La Nouvelle-Orléans, Katrina a provoqué un déclic chez elle : c’est après ce terrible événement qu’elle a décidé de se consacrer à la cuisine.
Hélène, qui accueille Marine à La Nouvelle-Orléans, a aussi eu sa vie chamboulée par l’ouragan Katrina. Elle, son mari et ses quatre filles vivaient dans une maison à Slidell, de l’autre côté du lac Pontchartrain. Elle raconte à Marine qu’ils ont évacué seulement quelques heures avant l’arrivée de l’ouragan, ne pensant pas que les conséquences allaient être aussi graves. Ils sont revenus une semaine plus tard. L’eau du lac avait envahi leur maison, qui n’avait qu’un rez-de-chaussée, puis s’est retirée rapidement, laissant de la boue et des débris. « On a tout perdu, les photos de famille, des objets, électroménager et vêtements. Tout. C’était un cauchemar », décrit-elle à notre reporter alors qu’elles dînent ensemble un soir.
Pendant plusieurs mois, elle et sa famille vivent dans une des pièces de la maison et une caravane, jusqu’à ce que la maison soit complètement nettoyée et rénovée. Il fallait faire le linge dans une bassine et cuisiner dehors. Heureusement, le climat n’était pas trop froid pendant cette période. De plus, les infrastructures ne fonctionnaient pas et les poubelles n’ont pas été ramassées pendant longtemps.
Toutefois, c’est aussi à ce moment-là qu’Hélène a trouvé la force de se reconvertir et de reprendre des études en médecine, ce qu’elle voulait faire depuis longtemps. Les labos universitaires où elle travaillait comme chercheuse avaient été inondés. Elle ne pouvait pas y travailler. Comme elle continuait à recevoir un salaire, elle en a profité pour réviser le concours afin d’entrer en médecine. C’est comme ça qu’elle est devenue dermatologue. Cela ne serait sans doute pas arrivé s’il n’y avait pas eu cet événement.
Alex KOLKER, que notre envoyée spéciale interviewe sur les conséquences de Katrina et la préparation de la ville aujourd’hui face aux ouragans, n’a pas eu sa vie bouleversée, car il est arrivé un an après la catastrophe. Mais l’impact de Katrina fait bien sûr partie de son domaine de recherche, lui qui est enseignant-chercheur à LUMCON (Louisiana University Marine Consortium) et spécialiste des régions côtières et de la montée des eaux.
Marine obtient son contact grâce à Jacques BARAN, le chargé de coopération et d’action culturelle à la Nouvelle-Orléans, qui a son bureau au Consulat général de France. Il s’agit d’une bonne personne à contacter, car les chargés de coopération culturelle ont souvent un bon réseau de contacts. Si Alex KOLKER ne parle pas français, il est très francophile, et a travaillé au Maroc pendant plusieurs mois.
Ils établissent un rendez-vous un matin et celui-ci propose de venir la chercher en voiture et de faire un tour de la ville pour voir les digues et les différents lieux affectés par l’ouragan. C’est parfait pour un reportage photo, car ce n’est qu’en voyant de ses propres yeux que l’on peut se rendre compte de l’ampleur des dégâts, encore aujourd’hui.
Notre reporter est surprise de voir que des quartiers, notamment le Lower Ninth Ward, qui fut l’un des plus affectés, n’ont pas été reconstruits. Cet ancien quartier où habitaient beaucoup d’Afro-Américains est même complètement laissé à l’abandon, et des traces des anciennes maisons n’ont jamais été enlevées. Quelques bâtisses encore habitées sont éparpillées entre les terrains en friche. L’interview est aussi enregistrée dans la voiture, habitacle idéal pour obtenir un bon son (si elle est garée dans lieu calme).
Alex KOLKER évoque d’autres ouragans qui ont marqué La Nouvelle-Orléans : l’ouragan Betsy en 1965, qui a provoqué d’énormes crues. C’est à partir de là que la population a commencé à décroître. Puis l’ouragan Ida en 2021, presque aussi fort que Katrina et qui est arrivé le même jour. Si les dégâts ont été moins importants à La Nouvelle-Orléans, il a beaucoup touché les tribus autochtones des bayous, du côté de Terrebonne, comme à Pointe-au-Chien. Il a aussi ravivé le traumatisme de Katrina parmi les habitants.
Un reportage réalisé en janvier 2024
L’interview originale est en anglais. Une traduction en français est disponible dans le kit pédagogique.