Apolline SABATE, chargée des relations publiques à TerraCycle, répond aux questions des globe-reporters et des globe-reportrices du collège Jean-François OEBEN, situé dans le 12ème arrondissement de Paris, à propos de la pollution induite par les masques chirurgicaux et de leur recyclage.
Innovations pour demain et après-demain
Les rédacteurs et rédactrices en chef du collège Jean-François OEBEN s’intéressent à un sujet d’actualité en ce mois de janvier 2021 : le port des masques imposé par les autorités françaises et ses conséquences en matière environnementale. Certains sont abandonnés dans la nature. Pour les autres, y a-t-il des filières de recyclage mises en place sur le territoire national pour contrer les effets dévastateurs de cette avalanche de matières très polluantes.
Lorsqu’elle commence ses recherches, la journaliste Chloé DUBOIS, notre envoyée spéciale, constate qu’il n’existe pas de consigne de recyclage pour les masques chirurgicaux. Il est demandé aux usagers de les jeter dans les poubelles noires (dont les ordures ne sont pas destinées à être recyclées) après utilisation. À terme, les masques sont donc enfouis ou incinérés, ce qui ne représente pas une solution écologique satisfaisante - d’autant plus avec les très grosses quantités de déchets à traiter en France depuis le début de la crise sanitaire.
S’il existe bien des initiatives, ces dernières sont locales et ne concernent que certaines communes ou territoires. Des entreprises de recyclages ou collectivités ont ainsi commencé à collecter et recycler une partie des masques usagés comme Cosmolys à Avelin (Hauts-de-France), Neutraliz, à Tours, Plaxtil à Châtellerault (Vienne), Cycl-Add à Oyonnax (Ain) ou encore TerraCycle en Île-de-France.
En fin d’année 2020, la Région Île-de-France a également lancé un « appel à manifestation d’intérêt » pour le recyclage « des masques et des équipements de protection à usage unique » visant à encourager les entreprises de recyclage à se saisir de ces enjeux dans l’intention de mettre en place une filière qui serait effective dans la région.
De son côté, notre journaliste contacte trois entreprises qui s’investissent dans cet enjeu : Cosmolys dans les Hauts-de-France, Le Masque Français et TerraCycle en Île-de-France. Après plusieurs mails et échanges téléphoniques, TerraCycle est la seule structure qui accepte d’échanger avec Chloé et de répondre à quelques questions. L’entreprise a mis en place un circuit de collecte et de recyclage des masques grâce à des boîtes « zéro déchets ».
Apolline SABATE, en charge des relations publiques à TerraCycle Europe, informe cependant Chloé qu’il est impossible d’organiser un rendez-vous dans les prochaines semaines.
« Bonjour, Chloé. Nous avons une seule petite équipe capable de répondre à vos questions, mais nous sommes actuellement très occupés. Il ne nous sera donc pas possible d’organiser une rencontre même en visio. Ce que je peux vous proposer pour avoir du contenu c’est de vous transmettre en pièce jointe le communiqué de presse sur la solution des Boîtes zéro déchet. Vous pouvez revenir vers moi si vous avez des questions et je pourrais y répondre par mail. En espérant que cela vous aidera. »
Une proposition acceptée par Chloé qui lui fait donc parvenir quelques questions.
On retrouve des masques un peu partout dans la rue. En ville, ces derniers sont souvent ramassés, mais dans la nature, ils vont rester au sol ou dans les rivières et polluer l’environnement qui les entoure © Globe Reporters
Avec quelles matières sont fabriqués les masques chirurgicaux ?
Les différentes matières qui entrent dans la composition des masques sont : les métaux (la barrette nasale), le polypropylène (PP) correspondant à la partie couvrante du masque et l’élasthanne (l’élastique).
Pourquoi ne sont-ils pas recyclables ? Qu’est qui pose problème ?
La difficulté principale est la séparation des matériaux qui composent les masques (PP et barrette en métal). En effet, les différentes parties des masques doivent d’abord être séparées puis chaque composant du masque recyclé en fonction de sa matière. Ainsi le plastique sera transformé en granulé de plastique recyclé et la barrette nasale sera fondue pour pouvoir réutiliser le métal.
Pour être plus précis, le métal est envoyé en fonderie pour être réutilisé. Le PP est aggloméré grâce à des équipements spécialisés pour ce type d’opérations. L’agglomérat de PP obtenu est ensuite mélangé avec d’autres sources de PP recyclé, puis extrudé en granules. Le PP des masques (qui a un indice de viscosité très élevé) peut être utilisé comme un ajusteur de viscosité pour obtenir un PP de qualité élevée. L’élasthanne est soit mélangé à d’autres plastiques recyclés (et cette matière sert à la fabrication de planches utilisées par exemple dans la fabrication de mobiliers d’extérieurs), ou bien directement utilisés comme additif dans la production de granulés de PP.
Existe-t-il des procédés qui permettent de décontaminer les masques et qui pourraient être généralisables ? Si oui, lesquels ?
Pour décontaminer les masques, nous demandons d’abord à nos clients d’isoler la boîte pendant 72 heures avant de programmer une collecte. De plus, nous mettons en quarantaine tout déchet d’EPI arrivant dans notre entrepôt pour recyclage, pendant une durée minimum de 14 jours afin de protéger le personnel qui manipule ces déchets. TerraCycle s’engage à offrir à ses collecteurs, clients et partenaires une solution de recyclage qui garantit la sécurité de toutes les personnes impliquées dans le processus.
TerraCycle propose des boîtes zéro déchet qui permettent de collecter les masques afin de les recycler ensuite. Comment s’organise la collecte ? Comment recyclez-vous les masques ? Existe-t-il différents procédés ?
Afin de recycler ce type de déchets, TerraCycle travaille avec des usines de recyclage qui transforment les déchets en une matière première secondaire réutilisable. Cette opération se déroule en cinq étapes :
1. La collecte : Les EPI tels que les masques jetables, les visières, les gants, les bouchons d’oreille, les filets à barbe et à cheveux, les lunettes de sécurité ou les vêtements de protection jetables (selon la boîte achetée) peuvent être collectés dans les Boîtes zéro déchet. Une fois la boîte remplie, le client doit la sceller avec du ruban adhésif et l’entreposer pendant 72 heures avant de programmer son enlèvement. Une étiquette de retour prépayée est située au dos de chaque boîte pour renvoi à TerraCycle.
2. La réception : TerraCycle enregistre tous les colis dès leur réception dans son entrepôt. Toutes les Boîtes zéro déchet sont mises en quarantaine à leur arrivée pendant une durée minimum de 14 jours afin de protéger le personnel qui manipule les déchets. Elles sont ensuite contrôlées, leur contenu est inspecté (sans contact) pour vérifier qu’il soit bien conforme aux déchets acceptés en fonction de la boîte correspondante. Les déchets sont ensuite mis en balles (ou en big bags) pour être transportés vers une usine de traitement.
3. Le tri et le broyage : Les EPI sont triés par catégorie en fonction des caractéristiques des matériaux (souples ou rigides) et de leur composition (PEHD, PP, PET, etc.). TerraCycle utilise un large éventail de technologies de tri. Celles-ci incluent notamment le tri manuel, la séparation par taille, l’utilisation de systèmes de flottation, la séparation optique, magnétique ou par densité, etc. Chaque catégorie de déchets est également déchiquetée pour détruire toute marque et faciliter le tri. Si nécessaire, les déchets sont ensuite lavés et triés en fonction de leurs caractéristiques.
4. Le recyclage : Chaque catégorie de déchets est ensuite, si nécessaire, mélangée à d’autres plastiques, puis fondue pour devenir une matière première secondaire utilisable pour la fabrication de nouveaux produits.
5. L’utilisation de la matière recyclée pour créer de nouveaux produits : La matière recyclée se présente sous la forme de granulés de plastique qui peuvent ensuite être utilisé par des industriels pour fabriquer de nouveaux produits, notamment du mobilier d’extérieur, des palettes d’expédition en plastique, des revêtements d’extérieur, des arrosoirs, des conteneurs de stockage, des bacs, des tubes pour la construction, etc.
Pourquoi n’y a-t-il pas encore des filières de recyclage à grande échelle, sur le territoire national ? De quelles personnes a-t-on besoin dans ce secteur ? Est-ce qu’il y a des ingénieurs spécialement formés dans ce secteur ?
Si presque tous les déchets sont techniquement recyclables, il n’est pas toujours rentable de les recycler par les méthodes de collecte traditionnelles. C’est pourquoi les collectes de recyclage des municipalités n’acceptent que certains matériaux comme le verre, le carton, et certains plastiques rigides.
Certains déchets comme par exemple les emballages souples alimentaires, les produits d’hygiène bucco-dentaire et les gourdes de compote sont fabriqués à partir d’un mélange complexe de matériaux qui nécessitent des machines et des techniques de recyclage spécifiques, ce qui rend le processus de recyclage plus coûteux que la valeur de la matière obtenue grâce au recyclage. C’est pour cela que de tels déchets ne peuvent pas être recyclés par votre commune : le système économique ne fonctionne tout simplement pas.
Pour résoudre ce problème de coût du recyclage, TerraCycle s’associe à de grandes marques pour offrir aux consommateurs des programmes de recyclage gratuits disponibles partout en France. Ces marques partenaires couvrent les coûts de transport et de traitement des déchets ainsi qu’un encouragement à soutenir une association caritative de son choix par des dons pour tous ceux qui s’inscrivent aux programmes et envoient leurs déchets à TerraCycle. En France, nous travaillons avec des entreprises telles que Nescafé qui sponsorise le recyclage des capsules de café Dolce Gusto et Spécial T, Harrys qui sponsorise le recyclage des sachets de pain de mie, Signal pour la collecte des brosses à dents et tubes de dentifrice, pour n’en citer que quelques-unes.
Pour les types de déchets pour lesquels nous n’avons pas encore trouvé de marque partenaire pour sponsoriser un programme, nous offrons une variété de solutions grâce au système des Boîtes zéro déchet (BZD). Les déchets que nous recyclons sont considérés comme "difficiles à recycler", ainsi le processus de recyclage des déchets tels que les EPI s’avère coûteux. Sans marque partenaire pour couvrir ces coûts, nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre de traiter les déchets gratuitement, ce qui explique que cette solution ait un certain coût. Chaque Boîte zéro déchet est vendue à un prix tout-en-un qui couvre les frais de transport et de traitement des déchets qu’elle contient. Ainsi, chaque boîte est accompagnée d’une étiquette d’expédition prépayée, ce qui signifie qu’il n’y a pas de frais supplémentaires pour nous renvoyer la boîte une fois pleine.
Une enquête réalisée en janvier 2021